Madagascar est l’un des pays les plus riches en biodiversité au monde, où plus de 18 millions de personnes sont dépendantes de cette biodiversité pour leur moyen de subsistance, dont 80% sont essentiellement dépendantes des ressources naturelles. En 2018, 1,5 million de Malagasy travaillaient dans le secteur de la pêche, générant environ 7 % du produit intérieur brut national. Au regard de la démographie galopante des communautés côtières et de la pression engendrée sur les stocks des ressources marines non renouvelables, depuis 10 ans Ocean Farmers et des ONGs intervenant dans le domaine de la gestion des ressources halieutiques développent des activités d’aquaculture villageoise contractuelle productive pour accompagner les communautés à disposer d’activités alternatives pour mieux respecter les mesures de gestion durable des produits issus de la pêche. Madagascar avec 2.000 T/an se classe en 4ème position et représente environ 0,5 % de la production mondiale d’algues. L’algoculture constitue une réelle opportunité pour générer des revenus supplémentaires/alternatifs pour les communautés, mais aussi d’engager des actions durables de cogestion des ressources naturelles et de protection des écosystèmes à haute valeur de conservation. Si nous les cultivons de manière durable, les algues peuvent se substituer au plastique, refroidir l’atmosphère, nettoyer les océans, reconstruire les écosystèmes marins, nous soigner et fournir des revenus aux populations côtières. Le carraghénane extrait de ces algues (à hauteur de 19 à 25%, du poids secs) est une fibre soluble utilisé en tant que bio-texturant dans l’industrie agro-alimentaire et cosmétique.
Ocean Farmers et Tetra Tech Company (organisation non- gouvernementale de droit Américain et maître d’œuvre du projet USAID/MIKAJY) ont signé un cadre de collaboration pour le déploiement du projet « Introduction de l’algoculture dans le paysage MaMaBaie » d’une durée de 7 mois. Cette collaboration est relayée par le projet « Nosy Manga : Aquaculture régénératrice pour la nature et les communautés », cofinancés par le Gouvernement américain par le biais de l’USAID Madagascar, Ocean Farmers et Indian Ocean Trepang, visant la promotion de la culture durable d’algues et de concombres de mer dans les régions Menabe et SAVA. Ainsi, 90 nouveaux fermiers localisés dans 3 villages de la région SAVA, ont été équipés afin d’accéder à une nouvelle AGR. Il s’agit de matériels et équipements dont ils ont besoin pour la culture (cordes, ancrage, flotteurs et fil pneu), la récolte (barques plastiques), le séchage et le conditionnement des algues (armature, filet d’étalage) et des équipements pour la vente de leur production (sacs, table de triage). L’utilisation de matériaux de qualité vise à allier durée de vie et moins d’impact sur l’environnement. Au total, 12.600 lignes de cultures ont été installées pour 90 fermiers (soit 140 lignes de culture par fermier) répartis au niveau de 3 sites de la commune de Vinanivao : Itanjona, Ambohimbato, et Vinanivao. Les fermiers bénéficient d’accompagnement de proximité à travers les 9 techniciens d’encadrement sur place. Grâce aux formations octroyées, les fermiers maîtrisent les techniques d’algoculture durables, l’organisation des fermes, la prévention des maladies et d’autres stratégies de gestion des risques
Ocean Farmers collabore étroitement avec son partenaire Wildlife Conservation Society, le réseau des APGL de la zone, Madagascar National Parks, les autorités locales et les services territoriales décentralisés (STD) notamment, la Direction Régionale de la Pêche et de l’Économie Bleue de la région SAVA (DRPEB SAVA) dans le déploiement de ce projet. La gouvernance relationnelle tissée avec les communautés de fermiers et les partenaires opérationnels est la clé de voûte de la mise en place des mesures de gestion et d’aménagement de l’espace marin.
Plus de 125 membres des communautés locales ont participé aux différentes consultations pour l’élaboration du SAGA et tous les commentaires des communautés locales ont été reçus, documentés et ont fait l’objet d’une réponse, expliquant les mesures prises et la manière dont elles sont mises en œuvre, suivies et rapportées. En parallèle, une Etude d’Impact Environnementale a été menée dans le but d’obtenir une autorisation de poursuivre les activités d’algoculture dans le cadre de cette subvention obtenue du Ministère de la Pêche et de l’Economie Bleue (MPEB) et la catégorisation délivrée par l’Office National pour l’Environnement (ONE).
Afin de lancer la phase de multiplication, 6 Tonnes de boutures d’algues ont été acheminées depuis Sainte-Marie, puis allouées aux fermiers. Malgré le stress lié aux transports, une fois en mer, les algues ont repris des couleurs et s’acclimatent plutôt bien dans leur nouveau milieu. Itanjona représente le site pilote. L’algoculture y est favorable et la production explose. Chaque fermier dispose en tout de 3 modules, ce qui représente 210 unités de culture puisque chaque module est composé de 70 lignes de culture. Le cycle de culture dure environ 40 à 45 jours avant d’effectuer la récolte puis le séchage. Un fermier peut donc effectuer 8 cycles de culture par an. Installées vers la fin du mois de mars, 90 tables de séchage sont disponibles, dont 40 déjà installées et utilisées par les fermiers. L’installation se poursuit. Au total, 58 embarcations sont disponibles sur sites. Depuis début avril, deux campagnes de collectes ont déjà été organisées par Ocean Farmers sur le site de Itanjona. Les trois autres villages sont impatients de commencer l’étape de séchage et la vente d’algues.
« Initialement défini comme étant une activité secondaire, l’algoculture est devenue une activité principale et nous permet de subvenir à nos besoins. Un fermier peut gagner jusqu’à 600 000 MGA par semaine de vente d’algue séchée avec en moyenne 14 sacs de 30 kg d’algues par semaine. Par ailleurs, l’algoculture est une activité difficile et demande beaucoup de temps et d’efforts, mais les techniques sont faciles à assimilées. L’algoculture demande une régularité dans le travail afin de dégager des revenus à la hauteur de l’effort fourni. Cette activité rapporte beaucoup plus d’argent que la pêche ou une autre activité, à l’exception de la chaine de valeur vanille ou girofle. Aussi, elle convient à notre mode vie et contribue à la diminution des pressions exercées sur la biodiversité marine puisque le temps de pêche est maintenant réduit à la consommation », a déclaré Sylvia algocultrice de Itanjona. L’impact positif de ce projet sur la conservation de la biodiversité est déjà visible depuis l’installation des tables de séchage selon Corine et Rajery, algoculteurs bénéficiaires du projet, et la perspective d’une pérennisation est déjà assurée par la présence et le soutien de diverses entités présentes sur place (Ocean Farmers, Wildlife Conservation Society, Madagascar National Park…)